Bertrand Calenge : carnet de notes

samedi 27 juin 2009

Outils 2.0 pour quels publics ? ou Quand il faut penser usages

Filed under: Non classé — bcalenge @ samedi 27 juin 2009
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Une fois n’est pas coutume, je me lance dans un billet technique Web 2.0. Je préfère en général proposer des réflexions sur les stratégies ou les perplexités à l’œuvre dans les bibliothèques, et pour lesquelles des outils ad hoc seront parfois imaginés par des personnes bien plus talentueuses, mais quand je trouve des bidouilles simples et vraiment utiles, je ne peux m’empêcher de les transmettre (un réflexe de comm’interne sans doute…). Ce qui pose la question de l’utilité, et donc des destinataires… On s’attachera ici à la dissémination des accès au catalogue, en donnant deux exemples concrets.

Un premier public : nos visiteurs fervents utilisateurs de nos collections

Lully, sur son blog « Encore un biblioblog…« , est une de ces personnes talentueuses qui manipule à merveille mashups, CSS, API et autres Yahoo pipes. J’admire, tout en pataugeant généralement dans ses explications , mais un de ses billets m’a suffisamment intrigué pour que je me lance. Le concept est simple : un internaute qui utilise le navigateur Firefox (quand même 1/3 des internautes… même si les Services informatiques des bibliothèques imposent souvent Internet Explorer pour les personnels   smileys Forum) peut télécharger sur Mozilla addons (le réservoir des thèmes et autres modules à la carte du navigateur) un plugin Add to search bar qui permettra d’intégrer de nouveaux moteurs de recherche dans la barre de recherche de Firefox. Ce plug-in a une particularité: une fois qu’il est installé dans Firefox, il est capable de reconnaître un grand nombre d’outils de recherche quand on se positionne dans la fenêtre de recherche d’une base de données qui vous intéresse. Prenons par exemple un catalogue de bibliothèque (Lyon au hasard) : vous accédez à la page de recherche, vous choisissez l’index le plus large – par exemple ici Auteur-Titre-Sujet combinés -, vous faites un clic droit dans la fenêtre de rédaction de la requête et choisissez dans le menu contextuel « Ajouter à la barre de recherche », une fenêtre s’ouvre, vous proposant de nommer cette base, vous le faites… et c’est tout !

un simple clic droit dans la fenêtre de requête

un simple clic droit dans la fenêtre de requête

Désormais, dans la barre de recherche de Firefox, vous pouvez choisir de chercher un terme ou un ensemble de termes dans Google, Wikipedia, Yahoo, .., et dans le catalogue de Lyon !

J’ai fait ces quelques manipulations simples, et j’ai ajouté aussi bien l’OPAC de la BmL que son métacatalogue Catalog+ (qui, non content d’intégrer l’ensemble des ressources de toutes les bases et catalogues de la Bibliothèque de Lyon, fonctionne sur des requêtes en langage naturel) !

en fin de liste, le catalogue BmL et Catalog+

en fin de liste, le catalogue BmL et Catalog+

Apparemment, il est des moteurs de catalogues avec lesquels ça ne marche pas : essayez avec le vôtre !

Quel intérêt ? Les visiteurs utilisateurs de nos collections disposent largement d’Internet chez eux ou au travail. Ils fréquentent le site web de la bibliothèque, dont 49 % connaissent l’existence selon une récente enquête de fréquentation (et 86 % des visites sur le site web conduisent au catalogue, selon Alexa !). On a vu que 33 % d’entre eux utilisent Firefox. Leur signaler cette manipulation par une communication adaptée leur permettra de vérifier rapidement, sans faire les quelques clics qui les obligeraient à aller d’abord sur le site de la BmL puis sur le catalogue puis sélectionner le champ de recherche le plus large, qu’un titre, auteur ou sujet est bien à la bibliothèque, et vérifier dans la foulée son état de disponibilité voire le réserver (puisque la barre de requête de Firefox les emmènera directement dans le résultat au sein du catalogue) ! Seul bémol : les utilisateurs doivent la première fois répéter leur requête, car il faut passer par la page d’accueil du catalogue pour recevoir un cookie qui les reconnaitra ; mais après, plus de problème tant que le cookie n’est pas supprimé (ah ! ces fichus systèmes clos et incapables de laisser leur contenu simplement offert du premier coup !…)

L’atout de l’outil tient ici en deux points : les utilisateurs potentiels du plugin sont nombreux, et l’outil qu’ils doivent télécharger est un outil non cantonné à UNE bibliothèque ou base de données mais utilisable sur d’autres donc plus facilement intégrable à un univers personnel.

Un second public : nos collègues acquéreurs

Il y a quelques mois, Notre Silvère bibliobsédé nous signalait une autre bidouille (ne vous y trompez pas, le terme est élogieux !!) concoctée par un jeune ingénieur souhaitant retrouver  instantanément sur la Fnac ou Amazon la disponibilité d’un titre dans une bibliothèque de son choix, sans même quitter la page où il naviguait, grâce à une fonctionnalité merveilleuse de Firefox (encore !) mais également adaptée pour Internet Explorer (quand même !) : il faut télécharger un autre plug-in – Greasemonkey : il modifie l’aspect des pages web ! -, choisir ses bibliothèques sur une carte ad hoc et ajouter celles qu’on veut, puis télécharger un plug-in spécifique. Une fois ces opérations terminées, une navigation sur la Fnac ou Amazon signale en-dessous de chaque titre si la(les) bibliothèque(s) choisie(s) possède(nt) ou non le titre par un code simple rouge ou vert. Explications complètes ici. Là encore, tous les catalogues ne répondent pas aux normes techniques permettant la manip’, mais il y en a un bon nombre !  Chapeau l’artiste ! Voilà ce que ça donne pour Lyon :

le catalogue BmL dans la Fnac

C’est vrai que l’outil est génial. Je suis en contact avec l’ingénieur concepteur du plugin – en vue d’élargir le panel des libraires et fournisseurs concernés -, mais plus pour mes collègues acquéreurs que directement pour nos lecteurs (même si bien sûr j’encouragerai la communication d’un tel outil auprès des lecteurs amateurs des collections). Pourquoi ?

La raison en est un peu floue, je l’accorde, et relève plus de l’intuition que du raisonnement valablement argumenté. Organisons les différents éléments :

– les manipulations sont nombreuses, et nécessitent une réelle maitrise des outils (deux plugins à télécharger, plus une sélection à opérer sur une carte dédiée) ;

– l’application ne fonctionne que sur une liste limitée de sites de libraires ;

– une fois l’information visible sur le site de libraire (la ou les bibliothèques sélectionnées possèdent l’ouvrage), il faut quitter le site du libraire et se rendre sur celui de la bibliothèque pour rechercher l’ouvrage.

Bref, c’est un outil de correspondance libraire –> bibliothèque réellement ingénieux. Mais quelque chose me dit que les amateurs et internautes et experts et amateurs de sites de libraires et passionnés de bibliothèque ne sont peut-être pas si nombreux que cela… Une fois encore, cela n’interdit pas de leur suggérer l’outil au sein de chaque site de bibliothèque, bien au contraire smileys Forum !

En revanche, il existe un autre public très directement intéressé au quotidien : les bibliothécaires acquéreurs. En effet, lorsqu’après lecture de nombre de critiques et sites spécialisés le bibliothécaire entre en phase active d’acquisition, il se connecte à des sites de libraires ou fournisseurs de notices (tels Electre, Amazon ou Decitre) en gardant constamment à l’esprit une question sous-jacente : « avons-nous le document à la bibliothèque ? ». En général, on commence par régler cette question en opérant une série de requêtes dans le catalogue pour éliminer les ‘déjà acquis’, avant enfin de s’attaquer à la question de la disponibilité et de la commande smileys Forum . L’outil de Damiano Albani (l’ingénieur en question) économise une étape lourde et fastidieuse, celle du tri préalable au sein du catalogue (à condition bien sûr que les titres en commande soient accessibles sur le catalogue en ligne). On établit sa liste au vu des choix critiques opérés… et on va directement au site du libraire en économisant le passage de tri via le catalogue  !! (et en plus si on utilise Moccam-en-ligne, on génère en même temps les paniers de commande et les notices d’acquisition du catalogue local !). Et en plus c’est gratuit smileys Forum !

Bref, on a là un public rêvé pour un outil parfaitement ergonomique. En l’occurrence ce n’est pas là tant le public de nos visiteurs-consulteurs-emprunteurs que le public de ceux qui les servent, les bibliothécaires ! Cela n’enlève rien à la valeur de l’outil, mais en vectorise l’intérêt.

L’outil est à la fois au service de la stratégie et asservi aux usages : gardons cette règle à l’esprit dès qu’on nous propose une innovation.

Non ?

vendredi 26 juin 2009

Incidente : le retour de la citation…

Filed under: Non classé — bcalenge @ vendredi 26 juin 2009
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Ah ! Je le savais bien : les règles de la citation académique sont bien bousculées par l’introduction des travaux collaboratifs (ou des oeuvres fondées sur la contribution). Un récent billet d’Actualitté signale un tel conflit portant sur l’absence de citation de la source, Wikipedia en l’occurrence, quant à de nombreux extraits d’un ouvrage paru récemment. L’auteur bat sa coulpe, mais je vous recommande la savoureuse phrase de l’article : « les wikipedianautes ont déjà noté cette absence de citation directement sur la page dédiée à l’auteur. Selon lui, le meilleur moyen serait de placer un lien dans son livre avec l’adresse de l’article recopié, mais l’éditeur n’est pas très chaud : étant donné les fluctuations qui agitent Wikipedia, il serait préférable de noter à quelle date il a consulté l’article. Pour plus de précautions…« .

Sincèrement, je ne suis pas anarchiste, et en aucune façon spontanéiste. Mais les fondements mêmes du statut de la doxa scientifique me paraissent devoir réviser sinon leurs exigences, mais du moins leurs codes smileys Forum . Réviser la nature même de la citation sera nécessairement l’une des étapes à résoudre au sein des savoirs numériques qui s’avancent…

vendredi 19 juin 2009

LOPPSI, suite

Filed under: Non classé — bcalenge @ vendredi 19 juin 2009
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Très très court billet pour vous recommander la lecture de cet article d’Ecrans, qui fait le point sur une étude d’impact conduite à propos du projet de loi LOPPSI, dont je vous ai parlé récemment. Cette étude, commanditée par le gouvernement lui-même, met en évidence les limites voire l’inanité des mesures envisagées contre la pornographie (liste noire non rendue publique), tout en soulignant les déplacements de responsabilité de l’éditeur vers le fournisseur d’accès.

Et on souligne, au passage, que comme pour la première loi Hadopi, il s’agit de substituer, là encore, l’autorité administrative à l’autorité judiciaire : « Il existe donc bien aujourd’hui, en France, un cadre légal, qui permet de bloquer des contenus jugés illicites hébergés en France, comme à l’étranger. Mais le gouvernement souhaite pouvoir aller vite. Donc supprimer le principe de subsidiarité. Engager la responsabilité civile et pénale des fournisseurs d’accès Internet. Et enfin évacuer l’autorité judiciaire« …

Bibliothécaires, veillez et alertez !!!

mercredi 17 juin 2009

Variations sur une bibliothèque sans livres

Filed under: Non classé — bcalenge @ mercredi 17 juin 2009
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Après être devenu une hypothèse largement probable dans certaines bibliothèques universitaires, voilà que le concept de bibliothèque sans livres commence à être abordé dans la lecture publique (voir par exemple les commentaires autour de ce billet du Bibliobsédé national, ou la réflexion de Xavier Galaup).

Le concept est intéressant et à certains égards crédible : le développement des liseuses et des livres électroniques, les accords passés par des opérateurs privés avec les éditeurs (l’exemple des débuts, même houleux, de Google en la matière, est sans doute appelé à se multiplier), la dématérialisation de la musique puis de l’image animée, la migration des revues scientifiques mais aussi des encyclopédies vers le tout-numérique, tout cela rend vraisemblable un basculement des supports de l’écrit, de l’image et du son vers le numérique… En outre, les bibliothèques à dominantes utilitaires ou prescriptives (documentation d’entreprise, universitaire, professionnelle) se verront encouragées à accompagner ce basculement de façon massive pour d’évidentes raisons de praticité et d’efficacité (dès que les contenus en jeu seront numérisés pour l’essentiel) : un documentaliste de presse exigeait récemment que les données complexes qu’il demandait – et qui abondaient sous forme imprimée – lui soient accessible sur Internet « pour que les journalistes n’aient plus qu’à copier-coller » (sic smileys Forum ).

Mais les bibliothèques publiques, sans livres et autres supports ? N’étant pas, malgré mon statut et mon grade, socialement et culturellement conservateur dans l’âme, ça ne me gênerait pas outre mesure, pourvu que demeure un espace d’information publique animé par des experts en navigation dans les contenus payés pour permettre et encourager sur les deniers publics le développement d’une connaissance partagée. Après tout, comme le suggère Xavier Galaup, tout restera à faire : « orienter les usagers dans l’explosion documentaire du web, participer à la société de la connaissance en créant des articles synthétiques sur des sujets ainsi que proposer des ressources en ligne en les documentant et en leur donnant du sens au-delà du simple signalement« . Ce serait en effet dévoyer notre fonction que de croire que son but ultime serait de manipuler des supports et non d’aider les gens à trouver de façon critique les informations (et les surprises !) dont ils ont besoin. Bref, il y aura toujours du grain à moudre, comme le souligne Dominique Lahary.

Mais la bibliothèque (publique) sans livres me semble être une réalité très imaginaire, fantasmée par ceux qui sillonnent quotidiennement Internet, et bien éloignée des réalités triviales des pratiques des publics. Trois exemples à l’appui :

– dans les kiosques, les magazines sont toujours aussi nombreux, parfois éphémères mais toujours en re-création : ils sont tellement bien adaptés au feuilletage que leur migration sur Internet reste encore balbutiante et peu convaincante. Quant aux prêts de magazines dans les bibliothèques, ils sont – à Lyon au moins -, en augmentation régulière ;

– si les prêts des livres historiques, techniques, juridiques ou économiques s’effondrent, les prêts de romans et BD se portent très bien, merci ! (je ne parle pas des DVD, au succès incontestable, mais que leur finalité – être lus(vus) sur un écran – rend ô combien fragiles face à la déferlante des téléchargements)

– enfin, les prêts de livres des secteurs destinés aux enfants explosent : à Lyon, + 50 % depuis le début du siècle !

Bref, si, dans le domaine de l’écrit, l’information documentaire migre massivement vers le numérique, on en est encore loin dès qu’il s’agit d’une lecture de découverte. On voit des usagers piocher un livre (même documentaire) dans les rayons juste pour le plaisir de la surprise, et s’installer tranquillement pour une heure ou deux de lecture… Les rapports aux moyens de la connaissance sont multiples.

Ajoutons à cela une dimension symbolique à laquelle je crois : les usages collectifs et individuels de la bibliothèque publique prennent leur caractère « intellectuel » par l’environnement documentaire visible et concret qu’il propose. Et cet environnement doit, pour les êtres matériels que nous sommes, s’incarner dans quelque chose de visible (j’aime bien les murs de livres anciens proposés à l’oeil du visiteur par la British Library ou la médiathèque de Troyes) :

Alors certes, il y aura moins de supports physiques dans les espaces de libre accès (Livres hebdo, rapportant le dernier congrès de l’ABF, soulignait que les nouveaux programmes des bibliothèques de la Ville de Paris prévoyaient 20 40 livres au m², contre 60 à 80 il y a encore quelques années), les collections matérielles y seront sans doute moins ambitieusement encyclopédiques, mais une bibliothèque (publique) sans livres, ce n’est pas pour demain !

Si ? smileys Forum

jeudi 11 juin 2009

Hadopi est mis hors d’état de nuire… Et maintenant, voilà LOPPSI !…

Filed under: Non classé — bcalenge @ jeudi 11 juin 2009
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Comme tout le monde, j’ai appris avec soulagement le retocage par le Conseil constitutionnel des points les plus contestables de la fameuse loi Hadopi. Je vous conseille la lecture en parallèle de la version votée au sénat le 13 mai et de la décision du conseil, ainsi que l’analyse toujours rigoureuse autant que savoureuse de maître Eolas.

Mais voilà, la question de la liberté d’accès à Internet n’est toujours pas réglée…

Un billet de Narvic, sur Növovision, met le doigt sur quelques éléments troubles qui me tarabustaient sans que j’arrive à les identifier. Je cite :

« Il s’agit en effet d’une autre bataille, qui se joue à quatre. Elle oppose les industries d’internet, des télécommunications et de l’informatique, aux industries culturelles et médiatiques. L’enjeu, c’est le partage du bénéfice de la tonte des consommateurs sur internet. Et si le gouvernement intervient dans cette bataille, c’est en partie en défense des intérêts de sa clientèle, et en partie par effet d’aubaine, car il y trouve un moyen d’accroître son contrôle sur internet, qu’il estime aujourd’hui insuffisant. Quant aux artistes et aux auteurs, personne ne se soucie d’eux en réalité dans cette affaire, ils n’ont été mobilisés que comme des alibis. »

Non, je ne suis pas adepte de la théorie du complot, mais derrière la question de la licence globale repoussée et de la défense gouvernementale d’intérêts à court terme d’industries culturelles que nombreux s’accordent à trouver exorbitants et inadaptés à l’évolution des usages, se trouve peut-être une ambition politique et une bataille de géants économiques autrement plus dangereuse : aujourd’hui, le combat opposerait non tant les propriétaires de contenus et les consommateurs-téléchargeurs-pirates (ces derniers sont en poids – comme les auteurs et artistes – des alibis dérisoires dans la bataille de milliards d’euros en jeu), que les éditeurs de contenus et les gestionnaires de tuyaux, bref les producteurs contre les FAI, dans un jeu à quatre incluant également les politiques et les citoyens ;

Il y a bien plus simple en effet que de traquer individuellement des millions de citoyens  : contrôler les fournisseurs d’accès eux-mêmes, en leur laissant le soin – et la responsabilité pénale – de veiller à limiter l’activité de leurs ouailles. Et voilà qu’apparait une autre avant-projet de loi, la loi Loppsi (loi pour la performance de la sécurité intérieure – voir aussi ici). Cette loi fourre-tout – on y évoque la chasse à la pornographie, la répression de l’usurpation d’identité, des questions organisationnelles pour les forces de l’ordre,… – est apparemment banale, se présentant comme la suite de la loi LOPSI (avec un seul P, loi d’organisation et de programmation de la sécurité intérieure), qui a été votée le 29 août 2002. Néanmoins, elle comporte des dispositions visant à intervenir sur Internet de diverses manières, et notamment envisage tout bonnement l’obligation pour les fournisseurs d’accès d’interdire tout accès à une liste d’adresses URL  arrêtée par le ministère de l’Intérieur (liste qui serait non publique).

Bon, je ne suis ni angéliste ni anarchiste. Je sais bien qu’il faut impérativement agir contre toutes les formes de la cybercriminalité (phishing, pédophilie, terrorisme, etc.), et j’applaudis des deux mains à toutes les entreprises en ce sens. Je sais aussi que publier une liste de sites manifestement illégaux aurait pour premier effet de faire migrer les déliquants ou criminels sur d’autres sites. Ceci dit, s’il peut exister effectivement des sites intégralement dédiés à la pédophilie ou à des actions criminelles, les réseaux des terroristes et autres criminels me semblent pouvoir opérer plus par des voies détournées (mails temporaires, sites piratés, forums anodins,…) que par des adresses officiellement estampillées ‘je suis un criminel’… à côté de quelques succès médiatiques prévisibles, une telle loi encouragera inévitablement la dissémination masquée des informations répréhensibles. Mais c’est normal de vouloi traquer le crime, et rien ne me choque sur ce point…

Mais interdire des sites sans publicité ni contrôle de l’autorité administrative – ni non plus sans contrôle de l’autorité judiciaire –  me semble exorbitant : la tentation peut être grande d’y glisser globalement des sites n’ayant rien à voir avec de la pornographie ou  du terrorisme, mais des sites de type « Casse-toi pauv’con » ou plus génériquement des plate-forme d’échanges de fichiers (type Rapidshare ou Megaupload), voire l’ensemble des forums Usenet, au grand dam des chercheurs qui utilisent abondamment ces deux derniers vecteurs d’échange et d’information.
Il serait souhaitable, même en l’absence de publicité qu’on peut comprendre pour la raison que j’évoquais plus haut, qu’au minimum un avis conforme sur la liste des sites incriminés  soit impérativement et préalablement  sollicité de la CNIL, dont la fonction est justement de veiller aux libertés sur Internet.

Sans cela, je ne serais pas loin de penser, sans paranoïa, que l’analyse de Guillaume Champeau n’est pas aberrante :

« Petit à petit, les pièces du puzzle s’assemblent et l’image se révèle sous nos yeux. Le projet de loi Création et Internet n’a pas encore été promulgué que déjà le morceau suivant s’apprête à faire son apparition. Projet de loi après projet de loi, décret après décret, nomination après nomination, Nicolas Sarkozy prépare méthodiquement les moyens pour le gouvernement de contrôler Internet… et les internautes. »

Ma réaction est d’abord celle d’un citoyen. Mais c’est aussi celle d’un bibliothécaire : toutes ces questions tournent finalement autour d’une même problématique, celle de la liberté d’expression. C’est cette liberté d’expression qui fonde la légitimité des bibliothèques dans les pays démocratiques : comme le souligne maître Eolas : la décision du Conseil constitutionnel dit clairement que « la liberté d’expression ne s’efface pas pour protéger des intérêts économiques catégoriels aussi nobles soient-ils« .

Que le dernier mot soit laissé à un État de droit, tout à fait d’accord. Mais pas n’importe comment !!!

Et vous, qu’en pensez-vous ?

jeudi 4 juin 2009

Biblio-fr s’arrête…..

Filed under: Non classé — bcalenge @ jeudi 4 juin 2009
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La nouvelle se répand bruissante dans toutes les bibliothèques : biblio-fr s’arrête. Dans un premier temps (personnel) je m’en veux d’avoir écrit ce billet qui a provoqué moult réactions (une collègue est même venue me voir en me regardant comme un meurtrier virtuel smileys Forum), dans un deuxième temps une grande impression de vide, m’a envahi, comme beaucoup d’entre vous j’imagine, devant cette perte symbolique aussi irréelle dans son annonce que le serait la disparition de l’ABF.

Cette disparition était, je le sais, évoquée par Hervé Le Crosnier bien avant mon billet, et nul n’imaginera – j’espère bien ! – que j’aie le pouvoir d’anéantir une liste de diffusion comptant plus de 17 000 abonnés, ce qui me rassure.
Quant à cet arrêt de la liste, lisez bien le message de Sara et Hervé jusqu’au bout : « Nous diffuserons toutes les idées qui pourraient s’inscrire dans la suite de l’aventure de biblio-fr : si vous voulez créer un site web, un blog, une autre liste de débat… qui participe du projet global d’intéresser les
bibliothécaires, nous diffuserons votre message. À vous de trouver les mots, de convaincre vos lecteurs.
 »

Biblio-fr ne s’arrête pas vraiment, il fait appel à l’intelligence de ses presque 18 000 abonnés actuels (et aux désabonnés). C’est un défi qui sollicite le recours à la collectivité des bibliothécaires et personnes intéressées par les bibliothèques. Cette dimension collective à laquelle les bibliothécaires se disent tellement attachés…

Alors, à vos claviers ! Faisons surgir les suggestions d’une communication adaptée à des milliers de bibliothécaires souvent maladroits dans la manipulation des outils du web 2.0, mais avides d’informations souvent triviales, de débats sur des questions parfois dérisoires, tellement avides !!

Mais ne proposons pas de refaire un « couteau suisse » de l’information bibliothécaire : les questions techniques de gestion professionnelle disposent désormais d’un service de Questions-Réponses ad hoc grâce à l’Enssib, offres et demandes d’emploi gagneraient à disposer d’un fil spécifique, etc. Il faudra à mon avis proposer des pistes complémentaires, et non tellement généralistes qu’elles en deviendraient cacophoniques.

Bref, et comme toujours avec biblio-fr, c’est nous qui avons la parole, cette fois-ci pas pour demander, informer ou récriminer, mais pour construire un nouveau visage à biblio-fr… Merci à Hervé et Sara pour offrir cette ultime opportunité !

Et il va bien falloir maintenant que je participe aussi à cette réflexion collective smileys Forum . Rendez-vous donc encore sur biblio-fr !!

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