Bertrand Calenge : carnet de notes

samedi 31 octobre 2009

Transmettre…

Filed under: Non classé — bcalenge @ samedi 31 octobre 2009
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Un coup de gueule de Michel Piquet, en commentaire d’un billet du bibliobsédé, pose quelques vraies questions : le terme de médiation n’est-il pas galvaudé (ce dernier supposant l’indépendance d’un intermédiaire commis au sein d’un conflit), et surtout le talent de transmission réclamé du bibliothécaire impose-t-il que ce dernier soit plus expert que son interlocuteur-client dans les contenus qu’il transmet ? Bon, d’accord, je schématise, mais si je comprends bien, la question posée par Michel Piquet interpelle à la fois le flou conceptuel de termes largement utilisés (jusqu’à parler de médiation 2.0…) et la nature même du statut d’intermédiaire qu’a le bibliothécaire.

L’imprécation étymologique envers l’usage « dévoyé »  d’un terme particulier ne m’émeut guère. Je n’éprouve par exemple aucun remords à transformer le sens social et vécu du ‘bibliothécaire’ pour en donner une autre définition que ‘le préposé à la garde de l’armoire aux livres’. Encore faut-il, et là je suis d’accord avec M.P., que la définition nouvelle soit rigoureusement étayée et repose sur un concept solide. Or je reconnais que l’invocation de la « médiation » est tout sauf rigoureuse. Non pour les raisons étymologiques invoquées, mais parce que  le terme évoque un vague entre-deux et surtout suppose, dans l’acception commune, un « médiateur » qui sait et un « médié » qui – le malheureux ! –  ignore…  Pourtant j’ai rarement entendu un bibliothécaire en université parler de ce type de médiation dans ses relations avec les enseignants-chercheurs ! Serait-ce réservé à la lecture publique ? Cela signifierait que les bibliothécaires-médiateurs y sont plus savants que leurs publics… ou du moins d’une bonne partie d’entre eux. Et vis-à-vis des usagers qui en savent plus que le bibliothécaire en face de lui (et ils sont légion !), de quel type de relation parle-t-on ?

Pour ma part, j’ai jusqu’à présent préféré le terme d’accompagnement à celui de médiation, justement pour reconnaitre la compétence – et non la soumission – de ‘mon’ usager interlocuteur : aider à trouver l’information idoine, ce n’est pas ‘savoir plus’, surtout si par exemple l’information requise concerne l’anatomie des poissons ou la chromatographie en phase gazeuse  (j’évoque ici quelques-unes de mes profondes limites cognitives…).

La neutralité du terme ‘accompagner’ est parfaite dans un monde stable, aux références établies et surtout partagées. J’aime bien l’idée de compagnonnage que ce terme sous-entend… Mais il est vrai que substituer ce terme d’accompagnement à celui de médiation ne règle rien, sinon évoquer une ambition qui se veut plus modeste et respectueuse de la diversité des publics.

Le problème, c’est que la pluralité des espaces de l’information et surtout la diversité des besoins, compétences et pratiques des personnes (bibliothécaires comme usagers) rend hasardeux le terme d’accompagnement, dans la mesure où il en rend indistinctes les différentes facettes.

L’expertise documentaire au service du public

La première de ces facettes, celle qui a provoqué le plus grand nombre d’écrits, concerne l’art de chercher face à une question documentaire. C’est là une compétence professionnelle à acquérir, maintenir et développer pour toutes celles ou ceux qui ont à affronter des questions d’ordre scolaire, pratique, professionnel ou scientifique. Certes, cet art de chercher ne peut se passer d’une réelle empathie avec le questionneur, mais il exige non seulement des apprentissages, mais également la confrontation réitérée à la diversité des questions. C’est un métier au sens le plus « dur » du terme…

C’est en même temps un accompagnement, car la mobilisation ‘recherchiste’ du bibliothécaire ne prétend aucunement maîtriser mieux que son client le champ des contenus au sein desquels il… cherche. Simplement, pour reprendre un vieil aphorisme, s’il ne connait pas la réponse, il sait où la trouver.

Au service de la découverte

La dimension professionnelle de cet ‘art de chercher’ m’a beaucoup fasciné, je le reconnais. mais le commentaire de Michel Piquet met le doigt sur une autre facette essentielle de la bibliothèque – au moins de lecture publique – : l’offre de la surprise, de la découverte. Le désir de surprise ne se limite pas à la découverte de romans ou de films, mais parcourt tous les types de documents. Et comme dans le cas précédent, c’est la position de l’usager, son intention, qui mobilisent bien d’autres compétences, et au premier chef l’art de séduire, d’attirer l’attention, d’exciter les papilles…

Il me semble que là, avant toute compétence strictement professionnelle, c’est effectivement – comme le souligne avec alacrité notre commentateur – une passion communicante qui est à l’œuvre : il faut convoquer ses propres intérêts, discuter avec le lecteur, laisser parler ses passions… La culture mobilisée n’est pas tant professionnelle que personnelle. Et, plus encore, le talent requis pour emporter l’intérêt tient de la connivence plutôt que de la connaissance.

Il est tout à fait juste de souligner, avec Michel Piquet (que décidément nous aurons suivi tout au long de ce billet), que la totalité des agents de la bibliothèque, quel que soit leur grade ou leur statut, peut intervenir dans ce dialogue humain de découverte et d’échange avec nos publics. Si par ailleurs je suis plus que sceptique sur la capacité de tout un chacun à « savoir chercher » – justement dans les domaines qui ne relèvent pas de la culture ou de l’intérêt personnels -, je devine qu’il est intéressant de creuser la nature des compétences à l’oeuvre dans cette proposition de découverte.

Transmettre ?

En effet on ne choisit pas ses publics – enfin le croit-on… -, et ceux qui viennent chercher une information précise sont – en bibliothèque publique au moins – sans doute moins nombreux que ceux qui sont demandeurs de découverte (du moins selon l’enquête du Credoc). Cette ambivalence oblige à questionner la fonction de la bibliothèque lorsqu’elle veut surprendre, faire découvrir. Et une idée me vient, somme toute très ancienne : et si nous ne faisions que transmettre ? Payés pour accumuler certes (une vieille fonction bien malmenée), mais surtout payés pour être curieux, attentifs aux textes, images et musiques. Et pour les faire partager à la communauté. Bref transmettre le savoir accumulé – en nos murs ou ailleurs -, le transmettre là où il est demandé et comme il est demandé.

Le stock nous échappe de plus en plus, Google en fait la démonstration quotidiennement. Mais la curiosité, l’écoute de la collectivité, le désir de transmettre et de partager nous demeurent sans concurrence publique. Et c’est cela au fond qui motive encore l’intérêt envers nos établissements. Pour répondre à cet appétit de découverte, il est indispensable de mobiliser l’ensemble de tous les agents, de toutes les curiosités, en dépit de tout statut (pourquoi d’ailleurs ne pas en outre convier la ‘société civile ‘ ?). Selon quels processus, quels talents, quelles compétences ? Le débat est ouvert…

Mais sans nul doute, parallèlement, en juste retour du statut spécifique des bibliothécaires et assimilés – au sens professionnel -, il est alors nécessaire de leur demander d’exercer complémentairement et expertement cet ‘art de chercher’  devenu si sophistiqué.

Non ?

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Astuce : pointer une livraison de libraire

Filed under: Non classé — bcalenge @ samedi 31 octobre 2009
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Un récent billet de Lully (la providence des bidouilleurs, le Descary des bibliothèques !smileys Forum) m’incite à proposer une astuce en complément de la sienne, qui montrait comment comparer deux listes de codes EAN.
Le tout est d’avoir sous la main droite la liste de livraison de votre libraire sous forme Excel, et dans cette liste les ISBN sous forme EAN, et dans la main gauche une douchette de lecture des codes-à-barres. A partir de là, on va réaliser rapidement deux opérations fréquentes en bibliothèque :
– on veut pointer la livraison au regard de la liste, pour en vérifier la conformité réciproque (i.e. tous les titres de la liste sont présents, et il n’y a pas de titres livrés en trop)
– en cas d’office de libraire, on veut pointer les titres de la liste qu’on va retourner au libraire, et en établir rapidement la liste.

1 – Pointer tous les codes-à-barres

Prendre la feuille Excel de la livraison du libraire. Créer une colonne vide en tête. Nommer cette colonne (par exemple ici ‘Douchette’). :

1_création_colonne_douchetteSe placer dans la première cellule vide de la colonne ‘Douchette’, et passer à la douchette tous les livres, dans le désordre. Ca va donner quelque chose comme ça :

2_colonne_codes_barres

2 – Vérifier l’absence éventuelle de titres dans la livraison (ou pointer la liste des retours)

En dernière colonne (ici colonne I, que j’ai nommée ‘pointage’), poser la formule suivante

= NB.SI(A:A;B2)

3_formule_pointage

Dans laquelle A:A désigne la colonne des résultats douchette, et B2 le 1er ISBN de la liste du libraire.

Puis attrapez la cellule par le coin inférieur droit, et tirez jusqu’au bout de la liste.
Le résultat doit être interprété comme un pointage de l’exactitude de la liste par rapport à la livraison (ou comme un pointage des seuls retours sur une liste d’office) :

–         si le résultat est 1, l’ISBN libraire de la ligne correspondante est bien matériellement présent (ou ce titre est bien listé en retour)

–         si le résultat est 0, l’ISBN libraire de la ligne correspondante n’est pas matériellement présent – livre manquant – (ou il s’agit de titres non mis en retour, donc gardés)

–         Il peut arriver que le résultat soit 2 : cela signifie simplement que vous avez bipé deux fois le même livre !!!

3 – Editer une liste des retours

Si vous vous arrêtez là, et qu’il s’agit seulement de pointer les retours, pour éditer une liste lisible (et imprimable) de ces retours, trions la liste de cette façon :

–         se placer en A1
–        Données / Trier / choix ‘pointage’ , par ordre décroissant

4_tri_pointés

–         Sélectionner la colonne ‘pointage’, clic droit ‘Copier’, se situer dans la 1ère cellule de la colonne ‘pointage’ et clic droit : ‘Collage spécial’ / ‘Valeurs’ :

5_copier_coller_valeurs_pointagesCela donne une liste dans laquelle tous les titres bipés comme retournés viennent en tête. Il n’y a plus qu’à supprimer la colonne ‘Douchette’ (colonne A), à mettre en forme et à imprimer pour joindre au colis de retour.

4 – Vérifier dans une livraison qu’il n’y a pas de titres en trop

Voyonsq le cas particulier du pointage d’une livraison, où vous voulez, outre vérifier que tous les titres de la liste sont présents, également vérifier qu’il n’y a pas un titre livré en trop, présent dans les cartons mais pas sur la liste libraire. Nous allons opérer un contrôle de plus. Dans la colonne qui suit la colonne ‘pointage’, nous allons créer une colonne de calcul supplémentaire (‘test’), et nous allons cette fois-ci proposer une formule différente :

=NB.SI(B:B;A2)

Dans laquelle B:B couvre la colonne des ISBN de la liste de libraire, et A2 la première cellule des résultats du scannage douchette. Et encore une fois on attrape la cellule comportant la formule et on la tire jusqu’en bas de la liste :

6_test_titres_livrés_en_trop

Le résultat doit être analysé comme un pointage de la cohérence du pointage par rapport à la liste de libraire.

–         si le résultat est 1 : le code-à-barres douchette de la ligne correspondante existe bien dans la liste du libraire

–         si le résultat est 0, le code-à-barres douchette de la ligne correspondante n’existe pas dans la liste du libraire : c’est un titre livré en trop ! Lequel ? Prenez le code à barres douchette  (colonne A) sur la ligne signalée 0, et faites une recherche par EAN dans Electre : vous verrez tout de suite quel est le titre en trop dans votre stock. Il ne restera plus qu’à le rajouter à la main dans la liste libraire.

jeudi 29 octobre 2009

Excentrer la bibliothèque : l’invention de la proximité

Filed under: Non classé — bcalenge @ jeudi 29 octobre 2009
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Récemment, je notais dans un recueil de textes sur « Quel modèle de bibliothèque ? » (aux presses de l’Enssib : très très intéressant, lisez-le !!) la remarque récurrente d’une nécessité pour les bibliothèques de « s’excentrer » (pour citer Christophe Evans dans ce volume), bref de se penser hors leur centralité architecturalement et procéduralement située. Cette nécessité d' »excentration » m’a fait réfléchir à un souci de plus en plus revendiqué : la proximité, celle-ci s’entendant au travers d’une activité des bibliothécaires et de l’institution auprès de l’ensemble d’une population, hors le balisage rassurant et contrôlé de la bibliothèque bâtiment public.

Le problème est que la proximité ne rime pas nécessairement avec l' »excentration », tant cette notion de proximité permet des discours totalement différents sous le couvert rassurant et consensuel d’un mot-valise vidé de tout sens à proportion de sa récupération. On a déjà connu ça avec coopération ou réseau, et je crains que 2.0 en prenne le chemin (si un autre concept ne vient pas rapidement le concurrencer tant la technoculture change rapidement…).

Quelques exemples de décodage potentiel de  cette proximité dans les bibliothèques :

  • il faut sortir à la rencontre des personnes exclues… pour les faire venir à la bibliothèque ;
  • nouons des partenariats extérieurs pour réaliser nos manifestations culturelles ;
  • tenons un stand dans une fête de quartier ou une manifestation culturelle locale ;
  • développons le site web de la bibliothèque, consultable par les usagers depuis chez eux ;
  • effectuons des dépôts de livres dans les prisons, les hôpitaux, les PMI, etc.
  • allons présenter des livres, lectures et informations sur la bibliothèque dans les écoles…

Et on pourrait multiplier les exemples… pour se rendre compte finalement que, de tout temps, la plupart des bibliothécaires sont déjà partis à la recherche de leurs publics en de multiples lieux. Rien de nouveau sous le soleil, donc ?

De l’établissement au territoire

Bien sûr, les bibliothécaires (enfin la plupart d’entre eux) n’ont jamais manqué de sortir en quête de nouveaux publics… à condition d’entendre comme nouveaux publics ceux qui entreront finalement dans la bibliothèque. Je me souviens de ce dialogue à peine imaginé :
– « Mon mari a adoré le roman policier que je lui ai emprunté !
– Eh bien, dites-lui qu’on en a des centaines d’autres, tout aussi passionnants !
– Pas de problème, je vais lui en apporter d’autres : montrez-les moi »
Et le bibliothécaire de conclure en aparté : encore un qui ne veut pas entrer dans une bibliothèque (donc « un non-usager »).
Alors que si ça se trouve, le mari est malade, ou ses occupations professionnelles ne lui laissent pas le temps de venir à la bibliothèque, ou encore c’est une connivence amoureuse : surprise des lectures que sa femme lui propose ?!

Parler de proximité, est-ce en dernier objectif vouloir que la population fréquente les espaces de la bibliothèque – et de préférence consulte ou emprunte les collections soigneusement disposées ? Ou n’est-ce pas un renversement de perspective : parler d’une proximité qui déplace les services de la bibliothèque – collections comprises – au plus près de la population dans son cadre d’activités familiales, professionnelles ou sociales, sans nécessairement vouloir que ce cadre intègre le lieu bibliothèque voire s’y déplace ?

Cette hypothèse de proximité réellement nouvelle n’augure pas de la disparition de la bibliothèque-lieu, essentielle comme espace d’information critique et espace social public (si rare aujourd’hui !), mais pose la question de la bibliothèque vivante sur le territoire de la population qu’elle sert, au-delà des services offerts dans un lieu à cette population.
Et là, effectivement, ce positionnement prioritairement territorial constitue une exigence vraiment nouvelle, qui doit accepter voire rechercher les cercles relationnels (familiaux ou amicaux), accepter aussi des services de vraie proximité comme le distributeur de livres dans le métro, le comptoir de prêt dans un centre commercial, le bibliovélo en zone piétonne, le dépôt de livres en bar de lycéens, et pourquoi pas le « bibliothécaire public » comme on connait l’écrivain public ? Je délire, mais je devine qu’il est mille services originaux et utiles à inventer, pas nécessairement flamboyants… mais tellement au plus près des gens !

By Der Kreole - Wikimedia Commons

L’établissement comme base stratégique

L’exigence de proximité signe la montée en puissance du territoire, ce fondement essentiel de la bibliothèque, devenu toujours plus prégnant au fur et à mesure qu’Internet permet des « consommations culturelles » domiciliaires donc irrigue ce territoire humain au plus près de ses habitants.Mais elle signale aussi une révolution copernicienne : le territoire ne tourne plus autour de la bibliothèque – du moins vu du point de vue des bibliothécaires -.

Cette révolution propose un rôle supplémentaire à la bibliothèque : l’exigence de déplacement, voire l’ubiquité. Et le lieu bibliothèque, ses processus et son organisation doivent dans cette configuration être pensés aussi (mais bien sûr pas uniquement) comme une base stratégique d’action en direction des publics du territoire… sans nécessairement vouloir les y ramener.

Cette extériorisation de l’action apparait avec l’émergence de services en ligne profondément internetiens, n’impliquant aucun déplacement impératif vers le lieu (alors que ces services organisent évidemment leur back-office dans le lieu). Il reste à inventer aussi des services « physiques » sur le territoire déconnectés du déplacement : tiens, par exemple, comment, malade ou handicapé, bénéficier d’un prêt de livres sans d’abord s’être déplacé pour s’inscrire ? comment organiser un flux complexe de stocks, de prêts et de retours via des points relais (les « kiala » du livre) ? Comment proposer des permanences de bibliothécaires-conseil dans des lieux incongrus mais susceptibles de réclamer leur expertise (musée, salon automobile, hopital, … cafétéria ?) ? Peut-on encourager des cercles de lecteurs construits à travers la proximité relationnelle des lecteurs ? Quelle est la réalité de l’implication des bibliothèques dans le book-crossing aujourd’hui ? Etc.
Bref, organiser la bibliothèque en fonction de la proximité et pas seulement vouloir y ramener des visiteurs, s’investir au-dehors de la bibliothèque pour la seule satisfaction des besoins rencontrés, sans s’imaginer destination ultime de ces besoins…

On remarquera que les exemples que je cite ne partent pas nécessairement du préalable d’un dépôt organisé de documents à l’extérieur, mais un déplacement des compétences et des échanges. Est-ce une illusion ? Est-ce aberrant ? Connaissez-vous des exemples concrets « présentiels » ?

jeudi 22 octobre 2009

Non, décidément, je n’utilise pas Twitter…

Filed under: Non classé — bcalenge @ jeudi 22 octobre 2009
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Vous savez tous mieux que moi que le dernier endroit où l’on cause est Twitter. Ce site de micro-blogging, dont d’autres ont mieux expliqué que moi les caractéristiques et possibilités, connait des thuriféraires tels qu’ils annoncent parfois la fin des blogs au profit des billets de 140 caractères maximum qui sont telllllllement plus efficaces et réactifs ! Alors, il y a plusieurs mois, j’ai ouvert un compte sur Twitter, et me suis abonné aux fils (en langage Twitter : j’ai ‘suivi’) de quelques personnes prises au hasard de mes appétences professionnelles – y compris hors de France -. J’ai dû poster 5 ou 6 « tweets », ce qui a sûrement déçu les… 72 ‘followers’ (si, si !) qui m’ont emboité le pas ! J’ai regardé régulièrement les tweets reçus pendant des semaines, et n’ai repris que récemment cette activité, après avoir éliminé (virtuellement !) les personnes évoquant à longueur de messages leurs douleurs capillaires après des soirées arrosées, l’inconfort de leur fauteuil, la beauté des petits matins ensoleillés ou diverses ‘geekeries’smileys Forum. Et décidément, je persiste à ne pas utiliser Twitter (et à continuer de transpirer sur les billets de mon carnet de notes…).

Matt Hamm

Je crois connaitre tous les bons arguments pour l’utiliser, et je pense effectivement, comme Silvère, que Twitter est un bon outil d’alerte pour des bibliothèques (avis d’arrivée d’une nouveauté, alerte sur une exposition), sans doute plus efficace et ergonomique que le SMS dans la mesure où c’est l’utilisateur qui choisit de s’abonner au fil et non à la bibliothèque d’organiser des adressages personnalisés (encore que le SMS permet une personnalisation – voilà VOTRE réservation – que ne permet pas Twitter). Je devine également que c’est un excellent substitut aux dépêches AFP, le journaliste pouvant très rapidement et largement (et brièvement !) diffuser son information (voir ici ou ici), de même que le dissident iranien ou le témoin d’une manifestation. Même Maître Eolas s’est livré à l’exercice pour relater en temps réel le déroulé d’une audience : le résultat est savoureux…

Mon refus ne tient pas à un refus de principe ni à une acrimonie argumentée, mais à un choix personnel de rapport  à l’information. Considérons les quelques 50 tweets reçus aujourd’hui (et c’est peu, compte tenu du faible nombre de personnes que je suis) :
– 60 % au moins sont ni plus ni moins que des fils rss, parfois généré en tweets par des générateurs de fils tel Friendfeed . D’ailleurs, on peut aussi à l’inverse aspirer ses tweets vers Friendfeed !! Hallucinant smileys Forum!
– 30 % sont des tweets qui relayent le lien sur des articles qu’ils ont reçu par rss ou par tweet (on s’y perd…). D’ailleurs, si on veut être vicieux jusqu’au bout, on peut suivre les tweets de quelqu’un en s’y abonnant par fil rss, et la boucle est encore bouclée ou plutôt amplifiée !!
– 10 % racontent leur journée ou leurs mésaventures technologiques (en moins de 140 caractères je vous rappelle. Au moins c’est court…smileys Forum).

Bon, je ne suis peut-être pas les bonnes personnes (j’aurais du en essayer d’autres smileys Forum?). Mais qu’est-ce que j’en tire ?

  • 90% de ces tweets ne font que présenter en deux mot un lien (dit de type ‘tinyurl‘ car même les caractères des liens comptent dans les 140 caractères, et c’est utile quand un lien de 135 caractères comme http://sbibbh.si.bm-lyon.fr/cgi-bin/bestn?id=&act=15&rec=2&auto=0&nov=1&t0=twitter&i0=0&s0=5&v0=0&v1=0&v2=0&v3=0&sy=0&ey=0&scr=1&line=1 peut être résumé en un lien de 26 caractères : http://tinyurl.com/yh7jph2). Bref, le message n’est pas dans le tweet, mais dans le lien : et il en faut des blogs et des sites pour que la valeur d’information de Twitter puisse commencer à recevoir une quelconque justification !
  • 90 % des articles que je consulte grâce à des liens signalés au cours de mes navigations le sont parce que l’article ou le billet qui m’y a guidé développe une argumentation, propose un regard intéressant sur une question, et qu’ainsi j’ai envie d’aller creuser un peu. Le contexte suggestif du tweet est, reconnaissons-le, singulièrement pauvre (tout le monde ne s’appelle pas Félix Fénéon : “M.X…, de Montauban, nettoyait son fusil. On l’enterre demain”. (63 caractères) » – merci Maître Eolas  !).
  • Mon agrégateur Netvibes – grâces lui soient rendues ! – ne compte pas moins de 70 flux rss soigneusement choisis (sans compter le flux de flux constitué par le Bouillon personnel de Silvère – pas le Bouillon collectif, pour des raisons similaires à celles qui me font rejeter Twitter…). Et si j’en ajoute chaque mois, j’en retire au moins autant – vieux principe de désherbage qui me parait également sain dans la gestion de l’information personnelle pour simplement… être capable de comprendre ce que je lis en en ayant le temps !smileys Forum

Je ne doute pas que Twitter puisse permettre pleins de services et d’usages drôlement intéressants (ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit), et je suis sûr que plein de marqueteurs, voire même des professionnels soucieux de rendre service , vont les inventer ou en ont déjà trouvé. Mais je me demande si cette sidération du flux, cette exacerbation du débordement et du ‘jamais trop plein’ n’est pas par certains côtés, sous des dehors de sociabilités transparentes, contre-productive…
smileys Forum

En tout cas, moi j’arrête d’utiliser Twitter.

mercredi 21 octobre 2009

Pratiques culturelles 2008 (suite) : la lecture ?

Filed under: Non classé — bcalenge @ mercredi 21 octobre 2009
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Ma première réaction, face à l‘étude 2008 des pratiques culturelles des Français, a porté sur un point de vue perso, le champ des besoins des publics. Cette réaction était sûrement légitime mais limitée, et je salue la grande richesse de cette étude au vu de  la diversité des réactions. Thierry Giappiconi, en commentaire au billet de Bibliobsession,  resitue l’étude en questionnant justement ses résultats au regard de la définition normalisée des fréquenteurs et plus généralement des ‘usagers’ ;  kotkot questionne  – comme Silvère et tout aussi justement – la définition « datée » d’une ‘lecture’ implicitement cantonnée à celle de l’imprimé ; Hubert Guillaud pose sérieusement la question de l’avenir du livre édité, y compris sous sa forme numérique, tant lui apparait dérisoire le « désir » – je cite – de téléchargement de livres.

A la lecture croisée de ces différents commentaires, on comprend vite que l’enquête questionne l’immense champ de la lecture , y compris par le titre de sa synthèse, qui parle de culture de l’écran, et qu’on pourrait tout aussi bien sous-titrer, des points de vue qui sont les nôtres : « quelles lectures de l’écran ? ».
Mais quid de la ‘lecture’ ?

Polysémie de la lecture

Depuis des années, je me suis battu pour que l’on reconnaisse comme lecture l’appropriation de textes  ne relevant pas de la lecture soutenue, tant sous la forme du codex  (les guides de botanique par exemple) que sous celle de la presse ou des magazines.  Mais bof, rien à faire : la pensée savante – et sociologique – n’a qu’à peine accepté l’inclusion globale du codex dans le phénomène de lecture, avec deux exceptions complémentaires : la revue savante (assez logiquement du fait de l’éminence des auteurs et de leur discours soutenu analogue à celui du codex légitime), et la presse (à mon avis du fait des débats scientifiques et sociétaux tenus par l’élite via ce support pendant deux siècles, et du même discours soutenu qu’ont volontiers adopté historiquement les journaux de référence – ah ! l’article du Monde qu’il fallait une ou deux heures à digérer ! smileys Forum-). Au-delà, combien de froncements de sourcils devant des éditeurs jugés légers, et a fortiori les magazines voire – horreur ! smileys Forum– les journaux gratuits !

Et voilà qu’aujourd’hui les écrans (enfin ceux d’Internet au moins)  proposent à la lecture en un flot indifférencié ces mêmes livres (encore plus revues scientifiques), journaux, magazines, et  des milliers d’entreprises personnelles (blogs, sites persos, bases de données institutionnelles ou non, etc.) ! kotkot a raison de souligner que toute navigation sur Internet mobilise le savoir-lire. Jusqu’où va la lecture ? Regarder (et entendre) le discours de Malraux pour l’entrée de la dépouille de Jean Moulin au Panthéon, est-ce moins « lire » que compulser le texte de ce long discours sans en revivre l’émotion initiale ?

Alors, de quoi parle-t-on ?

L’autorité de la lecture, ou la lecture d’autorité

Rien de ce que j’avance n’est bien original : ce que nous tendons à appeler lecture n’est pas tant une pratique individuelle qu’une pratique sociale validée par un intermédiaire habilité. Toute la subtilité tient dans les niveaux d’habilitation de cette pratique. Trois légitimités se combinent :

  • la légitimité scolaire : malgré toutes les évolutions de la pédagogie contemporaine, elle s’appuie sur le texte construit et transmis – glosé – au long des générations, c’est-à-dire historiquement sur le livre ;
  • la hiérarchie sociale des pratiques admissibles : je ne m’étendrai pas là-dessus, relisez « La culture des individus« , ce remarquable ouvrage de Bernard Lahire !! Voyez également la réaction de certains prescripteurs face à la légitimité de certaines ‘lectures’ …
  • l’organisation des filières de production : les éditeurs ont tout intérêt à revendiquer une communauté de valeurs (et d’intérêts !) fondé sur le codex, ses modèles d’élaboration et de diffusion économiques patiemment construits ;

Bref, l’enquête 2008 sur les pratiques culturelles des Français est marquée profondément par le poids de ces trois légitimités. Cela ne concerne pas seulement la « lecture » des livres, mais aussi la fréquentation des établissements culturels  : on peut  aller à l’opéra via la télévision (notamment quand on n’a pas d’opéra à portée de main), visiter des musées via des sites virtuels (de toutes façons on n’a pas le droit de toucher les œuvres dans les musées !). Qu’est-ce qui compte ou du moins est compté ? Les fréquentations d’un lieu – opéra, concert, bibliothèque,…-  , le support consommé en son acception socio-économique, ou… des pratiques individuelles en des opportunités diverses ? Olivier Donnat n’a pas tort de reprendre des items identiques à ceux des précédentes enquêtes sur les pratiques culturelles, dans la mesure où l’intérêt de telles enquêtes tient  dans l’analyse des évolutions diachroniques. Mais en l’état actuel des pratiques culturelles, cette étude brouille les repères cognitifs sur la lecture et la culture, et met surtout en lumière la prégnance des filières économiques et institutionnelles existantes !

Lecture de livres et bibliothèques

Nous autres bibliothécaires sommes si particulièrement réceptifs à cette conception de la « lecture » que nous y avons ajouté une quatrième légitimité, celle de notre propre organisation. En bibliothèque publique, le système logistique – et en bonne partie le système de référence – est fondé sur le livre. Les disques ou DVD sont les bienvenus pour soutenir le flux de l’intérêt des publics, mais le livre reste au cœur du système. Les périodiques ? Hors les revues savantes – assimilés aux livres -, les magazines sont conçus essentiellement comme agrément attractif. Internet ? Une nécessité imposée par l’air du temps !

Et si on peut asséner aux interlocuteurs un nombre de prêts de documents matériels tous supports confondus (livres, disques, DVD,…), on sent très bien par ailleurs  qu’un nombre de sessions Internet est dérisoire face à des interlocuteurs qui savent très bien qu’il est généralement tellement facile de se connecter à domicile, à l’école ou au travail. Bref, la bibliothèque publique est prisonnière de son propre modèle, sans pouvoir se dégager de sa tradition d’institution au service… de la « lecture » !

D’autant que nous avons intériorisé une conception de la « culture » qui nous assigne à la révérence du livre. Le dérisoire effort pour faire évoluer l’appellation de la bibliothèque (l’armoire aux livres) vers la médiathèque (l’armoire aux multiples supports) se trouve réduit à un argument marketing (à la façon dont le CREDOC le brandit) sans appeler une évolution des missions, qui restent soumises à la hiérarchie des supports : les disques, magazines, DVD, et ces objets étranges que représentent les écrans (de la télévision d’abord, d’Internet maintenant, et en tout cas pas des consoles de jeu, fi !) restent de modestes  compagnons de route des livres, pour nombre d’institutions bibliothèques au moins. Bref, une histoire de supports et d’organisations qui se cache derrière des interrogations informationnelles ou culturelles…

Entre livres et écrans, quel dilemme ?

Le billet d’Hubert Guillaud questionne une extension du domaine de la lecture qui intègre sans doute les écrans, mais qui au fond  recycle nos vieilles légitimités : comment se fait-il que les internautes ne se précipitent pas davantage vers le téléchargement de livres numérisés, alors qu’ils dévorent musiques et films téléchargés, et se repaissent de Wikipedia ?  Cette interrogation me pose  problème : elle laisse penser que le seul livre possible est le discours codifié et éditorialisé tel que la forme codex et l’appareil de l’édition en ont fixé le cadre. Or, même si Amazon ne vend pas autant de livres numérisés qu’il le souhaiterait pour son Kindle, les internautes plongent par millions dans cette immense encyclopédie sans éditeur qu’est Wikipedia, naviguent dans les ressources de sites institutionnels non mis en forme par un éditeur au sens classique, etc. On assiste à une explosion-mutation des modes de lecture, comme le soulignait ailleurs le même Hubert Guillaud.

En questionnant l’acte de lecture comme acte de structuration de soi par recours conscient à des informations structurées (faits, pensées, créations imaginaires), nous pouvons dépasser la stricte référence aux supports (et j’inclus Internet dans les supports). Le vrai changement dans la lecture, c’est la fin de l’exclusivité d’une information filtrée par l’éditeur.
Reste pour nous autres bibliothécaires à considérer comment la discrimination bibliothécaire peut s’ajouter se substituer au filtre de l’éditeur : le filtre de l’éditeur rejette dans le néant ce qu’il ne veut pas voir paraitre, la discrimination prend acte de l’accessibilité de tout (y compris de plus en plus des produits éditoriaux) et construit un appareil de lecture.

vendredi 16 octobre 2009

A propos des pratiques culturelles des Français

Filed under: Non classé — bcalenge @ vendredi 16 octobre 2009
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Vous n’avez évidemment pas manqué de relever que les résultats de la nouvelle enquête 2008 sur les pratiques culturelles des Français venaient de paraître, pilotée par l’inamovible Olivier Donnat. Enquête passionnante, et je vous conseille en particulier de vous plonger dans la synthèse mettant en parallèle les résultats de l’enquête de 1997 et ceux de l’enquête de 2008.

Ces résultats montrent la montée en puissance d’une culture de l’écran, des écrans devrait-on dire plutôt. Internet vient en tête, et on découvre que 57 % des 15-34 ans utilise Internet pour des fins personnelles tous les jours ou presque ! D’autres, mieux que moi, ont souligné que l’esssentiel tenait surtout à une mutation du type d’écran majoritaire – de la TV à l’écran connecté à Internet -, ou qu’il fallait se méfier d’affirmation portant sur la baisse de la lecture, cette dernière ne pouvant être cantonnée, même implicitement à la lecture de livres. Je voudrais juste souligner deux points :

Il est d’autant plus important pour les bibliothèques de s’ouvrir largement à  la consultation d’Internet dans leurs espaces et de s’emparer de services en ligne profondément implantés dans les usages de la Toile, que les publics qui fréquentent les bibliothèques sont aussi tendanciellement ceux qui ont des pratiques culturelles  abondantes et diversifiées et un usage assidu d’Internet :

pratiques culturelles cumulatives

Cette tendance est confirmée par une enquête de fréquentation conduite par la Bibliothèque de Lyon en 2008, qui montrait que 70 % des visiteurs disposaient d’une connection Internet à domicile, alors qu’en mars 2009 Médiamétrie estimait à 54 % la part des Français connectés à domicile au 2e trimestre 2008.

Inversement, il faut souligner une autre réalité, que me rappelaient des animateurs numériques lors d’une réunion : une bonne part des abondants publics des espaces numériques utilisent les postes mis à leur disposition parce qu’ils n’ont soit pas d’ordinateur à domicile, soit pas de connexion à Internet, notamment pour des raisons économiques. Nos efforts pour permettre à tous l’accès à la « lecture » ne doit pas manquer d’intégrer la dimension sociale de l’accès à Internet, part éminente, aux côté du livre, de l’information litteracy aujourd’hui.

Ces deux bouts de la lorgnette montrent bien l’ampleur du domaine de la lutte !…

mercredi 7 octobre 2009

Rien à voir : création vs responsabilité

Filed under: Non classé — bcalenge @ mercredi 7 octobre 2009
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Ce billet est complètement hors-sujet par rapport aux préoccupations bibliothécaires qui m’animent sur ce carnet de notes. Mais j’ai lu aujourd’hui un témoignage ‘coup de poing’ qui résoud avec crudité et lucidité les réticences que j’accordais aux réactions ‘cultureuses’ face aux multiples affaires judiciaro-culturelles qui ont agité le Landerneau des intellectuels – ou présumés tels- et bien sûr parfois des bibliothécaires.

Parmi cent exemples, vous vous souvenez bien sûr, de l’affaire Cesare Battisti ? Ce romancier italien  jugé et condamné en Italie pour appartenance à une bande armée (et convaincu de plusieurs meurtres par la justice italienne) fut largement défendu en France où il résidait et avait rédigé ses ouvrages, défendu certes pour des points relevant de contestations de points de droit, mais aussi et surtout parce qu’il était un créateur non récidiviste, et que la « culture » lui était redevable. Des associations de bibliothécaires ont soutenu activement ce « droit à l’oubli ».

Aujourd’hui, c’est l’affaire Roman Polanski qui agite ce même Landerneau. De quoi s’agit-il ? Je ne vous ferai pas l’injure de vous rapporter toute l’affaire : disons bonnement que cet homme, âgé en 1977 de 44 ans, a été condamné pour viol d’une mineure de 13 ans, s’est enfui de son pays, et vient d’être arrêté, puisque sous le coup d’un mandat d’arrêt international depuis plus de 30 ans. Les bonnes âmes culturelles s’indignent encore : ministres et intellectuels réclament encore le droit à l’oubli au nom de l’enrichissement culturel auquel ce cinéaste a contribué. On trouvera sûrement encore des bibliothécaires (encore que Polanski ait commis sur ce point l’erreur de réaliser des films au lieu d’écrire des romans…)

Dans ces deux cas, et dans bien d’autres, les créateurs (car ces romanciers, cinéastes, …  sont bien des créateurs), ont été condamnés par leur appareil judiciaire pour des crimes. Non des crimes contre les biens (je peux connaitre quelque indulgence pour ceux-là : Arsène Lupin a toujours été un héros positif en France…), ni des délits contre les bonnes mœurs (ça existe encore ?!), mais bien des crimes contre des personnes : meurtres, viol  sur mineure, ….

On m’objectera des grandes démonstrations : droit à l’oubli, amnistie culturelle (si j’ose cette innovation), erreur de jeunesse d’un génie (j’hallucine !!), etc. Comme si les créateurs étaient au-dessus ou plutôt en dehors des trivialités de la vie des hommes. Comme si l’activité culturelle se riait des règles communes et fonctionnait en (micro)cosme étranger à l’agitation et aux régulations des sociétés.

Alors, vous qui servez vos concitoyens tous les jours, qui vivez la « culture » et le savoir en prise directe avec vos publics, lisez cette « lettre ouverte à Monsieur Kouchner et Monsieur Mitterrand » : je ne sais rien de l’authenticité de son auteur, mais ç’a m’a été un coup de poing, je le répète.

La culture, pour nous, n’est pas, ne peut jamais être un univers d’œuvres disjoint de notre réalité sociale. Jack Lang avait dit « tout est culture », s’attirant ainsi divers quolibets. Aujourd’hui je m’empare du mot et je clame à mon tour que si tout est culture, n’en écartez pas l’auteur de la lettre que je vous signale, ni tout ceux qui font vivre la culture comme futurs lecteurs, spectateurs, voire sujets de ces œuvres que vous/nous voulons tant admirer.
Et je pourrais retourner l’aphorisme en disant qu’en matière de culture, tout est juridique, tout est social, etc. Sans sombrer dans le ridicule, acceptons que les hommes et les femmes dits ‘de culture’ soient des citoyens comme les autres, et surtout considérons tous ces ‘autres citoyens’ avec le même respect que nous portons aux ‘hommes et femmes de culture’.

Fin du hors-sujet… mais était-ce bien un hors-sujet ?

P.S. : mais surtout qu’aucun crétin n’aille retirer hâtivement les DVD de Polanski de ses rayons parce que créateur de génie a été condamné pour viol !!

Périmètre de la bibliothèque (2) : à construire ou à faire reconnaître ?

Filed under: Non classé — bcalenge @ mercredi 7 octobre 2009
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Dans un précédent billet, je m’interrogeais sur le périmètre de l’activité d’une bibliothèque. Entendons-nous bien : cette question n’est pas philosophique mais très précisément située. En effet, j’insistais sur le fait que c’étaient les tutelles qui posaient la question, dans un but de clarification des services rendus à la collectivité. Et mon interrogation s’attachait à la réponse possible qui pouvait être apportée. Bien entendu, la réponse ne peut tenir dans des « idées » ou des concepts, ou du moins pas seulement : il s’agit de définir des champs d’activité concrète, et non d’affirmer des ambitions universalistes là où on des moyens sont limités. Et l’exercice est intéressant, puisque contraint.

Bien sûr, on peut vouloir ré-affirmer concrètement le « modèle de la bibliothèque publique » tel qu’il a été porté en France et qui fait l’objet de travaux très intéressants à l’Enssib. On peut à l’inverse préférer abandonner toute idée ‘modélisatrice’ et vouloir conduire des périmètres  très différents selon les bibliothèques particulières.

Dans les deux cas, on risque de rater quelque chose :

Les insuffisances du modèle dominant de bibliothèque publique

Le modèle de bibliothèque qui a émergé au moment des années 1960-1970 est fondé sur un double socle : la mise en avant des collections, et la volonté de démocratisation culturelle. Est-on sûr que les collections soient toujours aussi premières, et la ‘démocratisation culturelle’ à la Malraux encore crédible dans ses manifestations historiques ?

Bien entendu, la constitution d’un stock documentaire – patrimonial en partie, visant la meilleure utilité pour la plus grande part -, comme le prêt et la consultation d’icelui restent un noyau dur d’activité encore aujourd’hui (mais  en l’état avec un potentiel de croissance faible, pour reprendre les typologies d’analyse de Jean-Michel Salaün). Bien entendu également, la vocation de la bibliothèque à servir tous les publics reste valide.
On sait aussi (mais sans toujours prendre conscience des impératifs d’organisation et de réflexes que cela suppose) que la bibliothèque est un espace public et social appelé à devenir le « living-room de la cité« . Mais pour ce faire il ne suffit pas d’élargir les horaires d’ouverture ni d’améliorer les conditions d’accueil. Il est bien des territoires très professionnels explorés aujourd’hui de façon timide, innovante ou du moins prescientes. Nous connaissons  le bouillonnement qui agite nos établissements, et notamment dans quatre directions :

  • la pédagogie de la connaissance connait une montée en puissance qui ne s’appuie que très partiellement sur les moyens et services traditionnels des bibliothèques : formation à la recherche documentaire dans les SCD, espaces numériques accompagnés dans les BM, ateliers pédagogiques, voire cette nouvelle ‘médiation numérique‘,  etc.  Cette activité est-elle reconnue comme appartenant au périmètre des bibliothèques, et pas seulement à celui des enseignants ?
  • le pilotage de la construction de corpus de connaissances déborde largement les seules ressources de la collection via l’organisation partenariale d’itinéraires au sein de corpus numériques,… Cette fonction n’appartient-elle qu’aux musées et aux chercheurs ?
  • résoudre les anomalies de connaissance (‘besoins d’information’ ?) d’une population donnée prend une importance insoupçonnée de plus en plus indispensable socialement : services de questions-réponses – en ligne ou en présentiel -, activités de médiation socio-documentaires hors les murs, etc. Le travail social peut-il négliger l’isolement culturel ?
  • la problématisation critique (au sens positif) du savoir occupe une place de plus en plus essentielle dans l’espace public : propositions d’analyses de textes, organisation de conférences et de débats, voire de colloques, etc. Les débats publics de société sont-ils réservés aux journalistes et aux savants ?

A chaque fois, sur ces questions on rencontre cent bibliothèques qui innovent. Il est essentiel d’étendre le domaine de la lutte au-delà des seules collections et de leur communication, pour faire entrer d’autres services dans le périmètre des activités légitimes d’une bibliothèques. Et non seulement légitimes, mais impératives. Évidemment, toutes activités mesurées à l’aune de la population servie par la bibliothèque, et déclinées en services mesurables…

J’ai bien conscience que les quatre axes que je soumets ont bien des points de recoupement. Mais ils partent aussi de points de vue différents qui, me semble-t-il, peuvent aider à tracer un nouveau périmètre. Lequel ne serait pas borné par la réalité toujours prégnante du stock et de sa communication, mais ferait de l’activité bibliothécaire, croisée avec la population servie sur un territoire, le mètre d’arpenteur de ce fameux périmètre d’activité.

En outre, et c’est particulièrement important, l’introduction de ces quatre axes (ou même d’un seul d’entre eux) impose des modification du périmètre implicite des bibliothèques et des compétences et organisations associées.

Le risque de l’abandon de tout modèle au profit de la singularité des établissements

D’un autre côté, comme on sait bien que les moyens, les histoires et les contextes de chaque bibliothèque sont très différents, la tentation est forte, notamment chez les bibliothécaires les plus innovants, de se dégager du modèle de la bibliothèque lieu et collection pour inventer librement un modèle local spécifique.
Outre le fait que cette liberté n’existe guère que fugitivement, et qu’il faut bien passer par des grilles de lecture implicite des décideurs,  le risque est d’abandonner ce faisant un espace qui transcende chaque bibliothèque particulière, l’espace de l’information publique.  A condition bien entendu de voir acceptée l’idée même d’un « service d’information public » : un service qui ait une place reconnue par les pouvoirs publics, au milieu et malgré les multiples services commerçants se battant sur des créneaux de ce type. Encore faut-il forger les arguments, construire des services mesurables, les rendre non seulement indispensables mais légitimes.

Ces services auront sans doute des déclinaisons différentes selon les moyens et contextes. Mais il me semble que la question de l’accès à l’information prend une importance majeure, politiquement, socialement et économiquement : discuter du périmètre de la bibliothèque, c’est discuter du périmètre de l’accès public à l’information !!

Non ?

samedi 3 octobre 2009

Arithmétique élémentaire : le « périmètre » de la bibliothèque

Filed under: Non classé — bcalenge @ samedi 3 octobre 2009
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En ces jours de prudence budgétaire (enfin,  pour les services publics, pas pour les banquiers ni les assureurs…smileys Forum) et de concurrence entre institutions dévoreuses de budgets publics, il est une expression qui revient souvent : définir le périmètre de l’activité d’une institution. En clair, rendre identifiable et légitime le champ d’intervention d’une institution donnée, et en particulier d’une institution culturelle. Et ce à plusieurs titres :
– politique (identifier le noyau dur de la nécessité d’une institution dans le champ de l’action publique),
– évaluatif (poser les outils d’évaluation là où ils sont essentiels et peuvent disposer de référentiels acceptés),
– gestionnaire (permettre d’envisager les métiers indispensables et les évolutions nécessaires de ceux-ci),
– arbitral (permettre la revendication d’une légitimité à organiser certaines actions), prospectif (identifier les besoins et moyens permettant à l’institution de couvrir son champ – pardon, son périmètre…),
– et bien entendu budgétaire (fournir les moyens de « remplir » le périmètre… dans la mesure des moyens, sans déborder !).

La démarche peut apparaître comme une technique de management visant d’abord à limiter les doublons d’interventions sur des terrains mal définis, et surtout à contenir les dépenses dans des limites justifiables.
Mais elle permet également de vérifier que les efforts consentis par la collectivité visent prioritairement à assurer la mission de l’institution. Un exemple imaginaire : un théâtre public peut-il dépenser ses deniers à faire fonctionner une école de théâtre ? La chose n’est pas impossible, mais mérite d’être actée pour que les budgets consentis en tiennent compte ; et dans ce cas, comment considérer les crédits à l’autre école de théâtre que la municipalité aurait imaginé de financer ? L’exemple est vraiment imaginaire je vous assure, mais montre bien qu’en période de rigueur budgétaire – et plus fondamentalement par souci de lisibilité de la gestion et de l’action publique -, les gestionnaires publics ont besoin de trier, de choisir, d’arbitrer, bref de déterminer qui porte quoi. Et peut-être que ce n’est pas si inutile pour les bibliothèques…

Alors, hasardons-nous à une opération géométrique élémentaire : définir le périmètre…  du champ d’activité d’une bibliothèque.

périmètre ... ?

périmètre ... ?

Le rêve de l’universalité des services

Un des problèmes que rencontre notre profession est justement son incapacité à borner ses ambitions. Non que les bibliothécaires soient inconscients de la réalité des moyens et des compétences, mais il faut bien l’avouer : nous sommes souvent plus doués pour saisir l’opportunité de l’offre que pour inventer l’originalité de la réponse à la demande. Cette posture a un avantage : elle nous permet d’arpenter mille territoires. De l’école de rue au blog quasi-personnel, de la formation des étudiants et des citoyens à la prise de position dans les débats de société, tout est porteur, tout est opportunité.
Et de ce point de vue, les bibliothécaires ne manquent pas d’imagination, au moins pour reprendre à leur compte les innovations et les récupérer à leur sauce.
La sidération est trop souvent de mise, et je cite des souvenirs entendus :

– « le Guichet du savoir c’est trop bien, quel partenariat nous permettrait de le mettre en œuvre chez nous ? » smileys Forum ;
–  » Faire venir ces groupes de rock, c’est un vrai succès, quels contacts pouvez-vous me donner pour imaginer la même chose chez moi ? » smileys Forum ;
– « Votre bibliothèque a un vrai succès avec ces outils technologiques que vous avez adoptés : pouvez-vous me donner les références techniques de ces outils ? » smileys Forum ;
– etc…..smileys Forum……… !?!

Bref, on se disperserait volontiers dans une universalité inconsistante et mouvante des services de bibliothèque, la différenciation entre établissements tenant en fait à l’écart entre la taille des  moyens et la sophistication des outils…

La contextualité localisée de chaque bibliothèque

Pour avoir côtoyé pas mal de bibliothèques, et accumulé quelques constats de situations diverses, je ne suis pas sûr du tout que l’on puisse ainsi faire équivaloir toutes les bibliothèques.
C’est bien entendu une question de moyens (la BM de Lyon peut conduire un programme international, pas la bibliothèque d’un village),  comme bien entendu une question de ressources documentaires (l’atout d’un riche patrimoine – qui est aussi un  poids – n’est pas également réparti).

Mais le périmètre potentiel d’une bibliothèque s’évalue également à trois autres aunes majeures :

  • la façon dont son histoire – ou celle de ses collections – s’articule avec l’histoire de la collectivité : la charge dynamique du patrimoine est incomparablement différente, pour la bibliothèque de village qui a entrepris la constitution d’un fonds local il y 20 ans, et pour la bibliothèque depuis longtemps patrimoniale qui héberge et exploite moult fonds patrimoniaux ;
  • le paysage cognitif qui environne concrètement cette bibliothèque : la bibliothèque d’un village, seule institution non marchande ouverte à tous, connaissant pour seul environnement  d’action culturelle et informative  la salle polyvalente, n’a rien à voir avec la grande bibliothèque publique, entourée comme à Lyon de plusieurs musées prestigieux, d’universités importantes, de cinémas et libraires nombreux, de multiples théâtres, scènes musicales, lyriques  ou chorégraphiques, etc. Autant la première se verra reconnue avec la multiplication d’actions de types très divers (spectacles, projections, fêtes, …) – et je dirais même qu’elle ne sera reconnue que si elle s’empare de ce champ élargi -, autant la seconde doit batailler pour ne pas se voir cantonnée à la diffusion documentaire et à l’exposition de son patrimoine documentaire.
  • les priorités sociales et culturelles de l’action publique conduisent à explorer des pistes non nécessairement arpentées jusque-là.

Un noyau dur ? Mais avec quelle consistance ?

Tout cela plaide pour une « spéciation » différenciée de ce qu’on appelle les bibliothèques, en fonction de ces histoires et de ces environnements. Mais parallèlement, on objectera la parenté évidente entre tous les types de bibliothèques, et partant de là on peut appeler à la définition d’un noyau dur commun à toutes les bibliothèques. Je leur reconnais la réalité concrète et partagée de la présence de collections organisées de documents, dont l’existence fonde la notion même de bibliothèque. Mais il s’agit là d’un matériau, non d’un périmètre d’activité.

Jean-Michel Salaün avait, à plusieurs reprises (par exemple , ou ), appliqué aux bibliothèques l’approche marketing des services de base et des services complémentaires, soulignant que chaque bibliothèque jouait sur sa gamme propre en sélectionnant et ses services de base et ses services complémentaires, et en jouant de plus sur la profondeur de ceux-ci.  Profondeur étroitement dépendante des moyens disponibles et surtout mobilisés pour chacun de ces services.
Le seul service de base commun qu’il avait repéré était justement, sauf erreur, la logistique de mise à disposition des documents de la collection, par l’organisation du prêt et/ou de la consultation de ceux-ci par les publics de la collectivité.  Ce qui me parait effectivement être ce réel noyau dur, incluant d’ailleurs les bibliothèques associatives, la plupart des centres de documentations, les archives, et pourquoi pas les vidéothèques de location.

Mais trois questions se posent face à ce modèle :

  • quelle intention sous-tend cette activité de mise à disposition documentaire, et donc selon quelles ‘profondeurs’ peut-elle être déclinée ? Un périmètre défini premièrement par la mise à disposition de documents n’est borné que par le choix des documents proposés, lesquels peuvent se décliner sous des formes bien éloignées des choix de la plupart des bibliothèques : les archives, les jeux, les tissus, les herbiers, etc., tous porteurs d’information pour les communautés intéressées… Sans critiquer cette inventivité, comment définir un périmètre des bibliothèques financées sur fonds publics à partir des seuls éléments porteurs d’information susceptibles d’être communiqués ?
  • l’introduction massive de l’information numérique, via Internet notamment, interroge les fondements même de cette mise à disposition de documents, dans la mesure où les collections matérielles perdent leur avantage de rareté via les numérisations, et où d’innombrables autres documents pertinents se passent de l’édition traditionnelle comme des acquisitions pour être – relativement – accessibles sur le web. Au fait, vous avez lu cette appréciation d’un maire,  pilotant pourtant une médiathèque très active, sur l’avenir des médiathèques en général ?
  • Enfin, la disponibilité élargie de l’accès à l’information – et de l’information elle-même – génère des processus de mises à disposition documentaires largement étrangers aux bibliothèques telles que nous les connaissons : à titre d’exemple, considérez ce diaporama de consultant d’entreprise justement intitulé ‘faire face à la maîtrise de l’information‘. Eux, ils ne s’interrogent pas sur la réduction d’un périmètre – et des économies subséquentes -, ils investissent dans … une mise à disposition documentaire d’un nouveau style !

Bref, les activités dominantes actuelles, si prégnantes soient-elles, peuvent-elles servir de fondement à une stratégie ? Je ne propose pas de les nier, ni de les sous-estimer dans leur intensité actuelle.
Je pose une question toute bête : face à la prégnance accrue du domaine d’Internet et aux stratégies des acteurs économiques actifs dans le domaine de l’information, l’approche d’un périmètre des bibliothèques partant de la mise à disposition des  collections (traditionnelles)  est-elle pertinente pour définir stratégiquement aujourd’hui un périmètre d’activité des bibliothèques ?

(La suite au prochain numéro…)

vendredi 2 octobre 2009

Statut, métier, et profil de poste

Filed under: Non classé — bcalenge @ vendredi 2 octobre 2009
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Olivier Tacheau, revenant sur son billet à l’occasion du mien et des commentaires associés, continue de s’interroger sur la question de la position des magasiniers et adjoints du patrimoine – et plus généralement des agents de catégorie C – en relevant que les réponses doivent passer par

l’action concrète, distincte et contextuelle et non dans le souhait de changements structurels générauxeux qui ne viendront pas (passer tous les C en B, modifier les grilles d’avancement, augmenter les salaires,…)

Je passe sur les autres considérations, et voudrais poursuivre ici  sur ce point particulier – c’est rigolo, ces dialogues par blogs interposés, qui donnent du corps aux itérations de l’hypertexte… et le tournis aux lecteurs ! smileys Forum– .

Résumé des épisodes précédents : dans un environnement qui professionnalise de plus en plus les acteurs, il reste une catégorie générique (C) dont le statut est tellement flou (reportez-vous aux billets d’Olivier et de moi-même) qu’aucun métier n’arrive à en définir des objectifs et des compétences, et à en organiser la reconnaissance. Je constate que les réalités concrètes des établissements fera fonctionnellement obstacle à une définition de métiers des adjoints du patrimoine (ou des magasiniers…), et Olivier encourage à conduire la réflexion au sein des établissements eux-mêmes sans attendre ou redouter une évolution des statuts. Fin du résumé.

J’ai un peu l’impression que la différence entre SCD et BM (pour parler vite, en fait c’est peut-être une différence entre établissements d’enseignement supérieur et collectivités territoriales) tient surtout à la place du statut dans la définition du métier.

Dans les SCD, le statut est roi. Cela n’empêche pas que l’application effective et concrète de celui-ci (dans le contexte d’un établissement donné) puisse connaitre des biais importants : j’ai encore en mémoire la façon méprisante de traiter les bibliothécaires d’État lors de leur émergence dans nombre d’établissements au cours des années 1990, alors que leur statut les garantissait comme cadres : ici considérés comme  BAS surqualifiés, là qualifiés de A- (oui :  « A-moins »,smileys Forum vous avez bien lu !!). J’ai cru comprendre que leurs compétences en matière de gestion de projet et de management d’équipes au public avait fini par les faire reconnaître : c’est vrai ? Dites-moi que tout roule aujourd’hui, s’il vous plait !!!

Dans les bibliothèques territoriales se déroule un autre processus pas inintéressant. Certes, le statut est là, et sert de fondement aux fonctions sur lesquelles la hiérarchie est susceptible  de réclamer compétences et efficacité. Mais s’introduit progressivement l’idée – au moins dans les plus importantes collectivités – que le statut n’est qu’un cadre générique, ou pour parler FPT une filière. Cadre certes prescriptif, mais non définition de métier.

Et certaines collectivités se hasardent à aller plus loin que le statut (général) et le profil de poste (adéquat à un poste particulier dans une fonction particulière), le second devant évidemment être compatible avec le premier. Et on s’oriente parfois vers ce que je n’hésiterai pas à appeler un « profil de métier » (même s’il porte rarement ce nom). Quid est ?

Un profil de métier définit un ensemble de missions et de compétences dans un environnement donné, précisant un statut et – autant que possible – prévoyant une possibilité d’évolution de carrière au sein du même métier et de la même filière.

Ca vous parait fumeux ? Alors un exemple avec une filière de plus en plus présente en BM sans être la filière culturelle : la filière animation.  A quoi servent les adjoints d’animation (catégorie C) et les animateurs (catégorie B) dans une BM ? Trois axes (au moins) peuvent être dégagés :
– les animateurs purs et durs : spécialisés dans les expositions, les événements culturels, etc., tant dans leur réalisation que dans leur montage matériel ;
– les animateurs numériques ou multimédias : chargés de gérer la pédagogie du numérique auprès des publics ou les ateliers de création à l’aide de cet outil ;
– les médiateurs socio-culturels : chargés de gérer les conflits, de nouer des contacts avec les acteurs sociaux et culturels du territoire, d’explorer le ‘hors les murs’.

Dans les trois axes, on parle toujours de la filière animation, et pour la plupart de la catégorie C.  Mais en construisant des profils de métier, réclamant des compétences distinctes, on définit des fonctions, on articule leur action avec les autres agents de façon positive et complémentaire, on élabore un référentiel de compétences, on peut construire des programmes de formation ad hoc. Ce qui n’empêche pas par ailleurs de définir des profils de poste insistant davantage sur tel ou tel aspect du métier identifié, dès lors qu’il s’agit de recruter, mais toujours en respect de ce profil de métier.

Cela se fait bien sûr à condition de disposer d’un nombre d’agents suffisants, et bien sûr en conformité avec le cadre fixé par les statuts (et on ne va pas inventer de nouveaux statuts pour autant !). Mais on construit des métiers (et des professionnels) sans compter sur les statuts pour les définir – ce n’est pas la fonction des statuts – ni sur la seule bonne volonté des établissements dans leur cuisine interne, pour les voir reconnus au niveau d’une ville  (voire de plusieurs, on peut rêver !).

Alors ma question reste pendante : quid du ou des métiers des adjoints du patrimoine, ou des magasiniers ? smileys Forum

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