Bertrand Calenge : carnet de notes

mardi 1 Mai 2012

Ecrire moderne ?

Filed under: Non classé — bcalenge @ mardi 1 Mai 2012

Un récent billet d’Hubert Guillaud présente élogieusement une maison d’édition qui propose de créer des ‘ouvrages’ offrant moult opportunités : modifications liées à la géolocalisation, interactions avec les choix du lecteur comme avec sa position dans l’espace, etc.  Et il se navre tant du faible intérêt des auteurs que de la maigre inventivité des éditeurs dans ce domaine innovateur. Je vous livre quelques éléments que je lui ai apporté en commentaire.

J’ai toujours pensé et je continue de penser que le génie de la création s’exprime plus fortement dans la contrainte. Lever les contraintes de l’imaginaire au moyen de la technologie obligera sans doute à déplacer les limites de ces contraintes : si c’est trop facile (ou du moins ne réclame qu’un peu d’habileté technique), à quoi bon s’y colleter ?

Je suis intrigué par cette obstination à attendre des auteurs de livres qu’ils s’emparent de ces nouvelles opportunités techniques. Leur domaine, c’est justement l’écriture, et c’est par l’écriture qu’ils provoquent chez leurs lecteurs des machineries mentales encore plus puissantes que les prodiges de la technologie vantée, qui forcent l’étonnement, mais non l’admiration. Un Lovecraft, ou un Jean Ray trop oublié,  se passent assez bien des effets technologiques vantés, en en rendant  l’impact de façon fascinante…

Ou alors, il faut appeler (ou plutôt espérer) des créateurs (et non des auteurs de littérature) qui, immergés dans ce nouvel environnement qu’ils manipuleront sans effort, oseront aller plus loin et inventer des mondes que la technologie ne saura pas mettre en algorithmes. Le cinéaste, ce créateur contemporain, travaille à partir de tels effets extraordinaires et en tire une écriture fascinante, tel un James Cameron avec Avatar. A chaque époque ses créateurs : les éditeurs ne peuvent que les guetter (et avoir le nez fin pour en détecter le génie), ils ne peuvent en prescrire l’expression. Sauf à faire fabriquer des œuvres de commande, ce qu’ils maîtrisent assez bien.

Entre plume ou clavier, livre ou blogue, film classique ou débauche d’effets spéciaux, exposé vivant ou prose indigeste, réalité augmentée ou texte plat, il n’y a pas de choix réel. Dans tous les cas, il s’agit d’écrire et de lire.
Et qui écrit ? Pour dire quoi ?
Et qui lit ? Pour devenir comment ?

2 commentaires »

  1. Selon moi et en accord avec des analyses que j’ai entendu, les écritures numériques seront créatives dans le cadre d’équipe multidisciplinaires comme pour un film ou pour les jeux vidéos…

    Commentaire par Xavier G. — mercredi 23 Mai 2012 @ mercredi 23 Mai 2012

  2. @ Xavier G. :
    Peut-être, peut-être pas… L’image que nous pouvons avoir de la création en mode numérique est très marquée par ces créations multimédias que sont les films et les jeux vidéos. Mais ce serait faire injure aux créateurs à venir que de les cantonner à ces modalités de création déjà connues.
    Le propre de la création est justement d’inventer des formes nouvelles d’expression, et certains créateurs (par exemple les surréalistes) ont merveilleusement joué de plusieurs palettes simultanées.
    En ce qui me concerne, je ne veux pas prédire ce que seront ces créateurs ni non plus ce que pourraient être leurs créations. Parce que je ne peux pas, ni vous, ni personne d’autre. Les palettes sont infinies, et la création collective (sous quelque forme que ce soit : simultanée dans un projet précis, ou pourquoi pas en construction progressive et participative…) comme l’inventivité personnelle demeurent des friches porteuses d’espoir et en aucun cas de prescience.

    Commentaire par bcalenge — mercredi 23 Mai 2012 @ mercredi 23 Mai 2012


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